les temps sont difficiles

06 dec. 15

Cloué au sol dans un magma glauque d’informations envahissantes.

Atterré par la violence des actes et des paroles politiques qui nous assignent à résidence. Trahison après trahison. Que faire si ce n’est rester à notre place. Retranché à l’atelier comme derrière les murailles d’une bastide réputée inviolable … jusqu’à ce que la preuve du contraire nous pousse dehors par impossibilité totale d’exercer notre simple droit de vivre autrement. Résister: le mot est certainement encore trop belliqueux. Les images qui l’accompagnent s’ornent toujours d’un héroïsme qui n’a aucune raison d’être dans les choix que j’ai pu faire … car ce ne furent finalement pas des choix, mais une nécessité d’être, sans autres possibles. Jamais je n’ai imaginé vivre une autre vie, jamais je n’ai imaginé acquiescé à toutes les conneries qu’on nous raconte, nous plongeant dans la peur de quelque engagement.
j’ai eu sensation rapidement que l’art pouvait m’ouvrir d’autres voies que celle choisit par mon père, d’un militantisme politique que je sentais usé, et qui m’aurait obligé à l’époque d’accepter de rentrer dans le monde ”du travail”, ce que je refusais. Au bénéfice d’une vie plus dure certainement, moins confortable, mais tellement plus libre et plus excitante … Je voulais tous les jours créer mes propres sentiers et tenter de déchiffrer le monde à grands coup de dessins et de sculptures qui n’auraient d’autres utilités que de m’éloigner un peu de la mélancolie. Qui n’auraient d’autre dessein que de tenter de partager une vision complexe, me rapprochant de ceux qui y reconnaitraient leur propres incertitudes. Faire juste ce que je me suis promis de faire. Les artistes tiennent parole. Du moins sont ils sensés le faire contre vents et marées. Et le simple fait de ne pas déroger prend là, valeur sacrée. Résister et continuer notre travail sans peurs. Continuer est certainement un mot plus juste, moins romantique, plus banal et quotidien. Retourner à l’atelier car on nous y attend autant que l’on s’y retrouve. Sourdement, certains comptent sur nous pour assurer cette continuité. ”Certains” c’est la famille qu’on s’est construit, ceux pour qui on travaille et dont le regard nous importe. Que ceux-là se rassurent, nous ne transigerons pas. Nous continuerons juste pour dire que d’autres chemins existent et qu’il est toujours possible de les prendre quoique nous serinent tous les faux-penseurs qui cherchent à nous noyer dans la bêtise comme des chatons indésirables.
Pour la première fois depuis bien des années, voici quelques semaines que je ne suis pas retourné à l’atelier. Frappé de plein fouet, touché … mais pas coulé. Je vais reprendre ma guerre à moi. La seule pour laquelle je puis me battre, celle qui ne met en cause que ma propre vie dans toute son intimité. Persuadé que rien n’a valeur d’exemple et que je ne ferai pas mieux que les autres … La confusion est grande, mais je sais qu’il n’y a pas d’autre solution que de rester le plus possible fidèle à ce qui me tient en vie depuis toujours.

"Ceranews" le site dédié à la céramique nous souhaite joyeux noël … tout va bien!